Si Christine Gagné a habitué les fréquentations de la Galerie de Miss Rey à des toiles et à des sculptures de bronze féminines et raffinées, c’est aujourd’hui au travers d’un nouveau médium que son sens de l’esthétique et du détail courtise l’œil attentif des visiteurs.
Depuis seulement deux mois, l’artiste multidisciplinaire s’adonne à l’art numérique, troquant ses toiles et ses pinceaux contre une tablette électronique et un stylet.
Un mouvement artistique
« C’est la première fois qu’elle expose ses œuvres créées grâce aux outils numériques. Son évolution est incroyable! », suggère Clea Reynolds, propriétaire de la Galerie ornée des œuvres de l’exposition de Christine, intitulée Frontière secrète, pour évoquer les « lignes imaginaires dans nos esprits, ces limites qui nous empêchent parfois de faire un pas en avant et de découvrir un monde qui nous appelle depuis si longtemps », propose l’artiste. La série d’illustrations numériques, imprimée sur des toiles en acrylique, met de l’avant des personnages féminins inspirés de la culture autochtone, dont une fillette au visage doux, coiffée de nattes et entourée de colombes. C’est son désir d’apaiser, de panser ne serait-ce qu’un peu les blessures du peuple autochtone, meurtri par l’actualité et l’histoire du pays, qui a inspiré à Christine Gagné cette création à découvrir.
« Ce n’est pas l’ordinateur qui dessine (…) Il faut démystifier ce qu’est l’art numérique. » – Clea Reynolds
Les possibilités de création
Christine se sert ainsi d’applications sur son iPad Pro, soit Procreate et Photoshop, pour créer plusieurs couches différentes, appelées « calques », séparant ainsi ses couleurs et ses tracés, qu’elle peut choisir d’isoler et d’éditer individuellement. Elle crée ses propres motifs, bouts de pinceaux et étampes virtuelles, puis les disperse, tantôt en arrière-plan, tantôt en motifs sur le vêtement gondolé de l’un de ses personnages. Ni vu ni connu, elle peut changer la couleur de ses calques, jouer de leur intensité en en changeant l’opacité, puis revenir en arrière et effacer ce que bon lui semble, comme jamais il n’a été possible sur du papier ou sur une toile. « Les tracés blancs que l’on voit, notamment sur sa toile Filles du vent, en mèches de cheveux ou en fleurs dans l’arrière-plan, sont en fait réalisés avec l’outil “gomme à effacer”, à défaut d’être des traits pleins », indique Mme Reynolds.
« Oui, c’est à s’y méprendre. On dirait une toile entièrement réalisée avec de la matière physique, tellement le rendu final en reproduit le détail et la nuance. Certes, le numérique a pour limite l’absence de relief, mais on peut créer l’illusion d’une texture en jouant du grain, ce que Christine fait habilement », d’observer la fine connaisseuse d’art. On peut également imprimer l’œuvre numérique sur un panneau en acrylique de n’importe quel format et l’image en restera impeccable. « C’est un autre avantage propre à l’art numérique. La qualité de l’image ne se perd jamais et on peut l’agrandir sans la pixeliser », d’ajouter Clea.
Un art à démystifier
« Ce n’est pas l’ordinateur qui dessine. C’est vraiment Christine. Sinon, on parlerait d’algorithmes ou d’intelligence artificielle », précise la galeriste, qui souhaite faire l’éducation de ceux qui ignorent les subtilités de cet art. « Il faut démystifier ce qu’est l’art numérique. Après tout, il en existe au moins 15 types. L’art de Christine s’apparente notamment à du dessin vectoriel en tracé manuel, en deux et trois dimensions. C’est elle, l’artiste, pas l’algorithme! »
Les œuvres de la série Frontière secrète seront exposées à la Galerie de Miss Rey jusqu’à la fin du mois d’août.
Source: Journal de Chambly
Par: Chloé-Anne Touma